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Des tests génétiques ciblés aux tests génomiques globaux

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« Les tests génétiques regroupent tous les examens dont les résultats renseignent sur les caractères génétiques d’un individus ». Perrine Malzac et Marion Mathieu en expliquent les enjeux dans « Tests génétiques : illusion ou prédiction ? ». Ce petit livre très instructif présente les enjeux des différents types de tests génétiques, le cadre juridique à la fois pour les tests eux-mêmes, la conservation des échantillons, ainsi que les questions en suspens dans le domaine du consentement, de la vie privée et notamment du “droit de ne pas savoir”. 

De nouveaux enjeux apparaissent avec le passage de tests génétiques ciblés sur certains gènes aux tests génomiques, c’est à dire d’un grand nombre de gènes ou de régions génétiques. Dans cette exploration globale et simultanée du génome, via le séquençage haut-débit, il  devient impossible d’anticiper les résultats. A la clé, de plus en plus de découvertes fortuites, inattendues, et de variants inconnus difficiles ou même impossibles à interpréter selon les connaissances du jour :  « l’incertitude porte non seulement sur les variants génétiques que l’on pourrait trouver, mais aussi sur la valeur clinique et la signification de ces variants, sans compter le contexte d’incomplétude de nos connaissances ». 

En France la loi n’autorise que les tests médicaux

En France les tests ne sont autorisés que dans un cadre médical. Le Conseil d’Etat dans son rapport de juin 2018 recommande d’ailleurs de conserver cet interdit car ” l’importance symbolique de cet interdit plus que par son effectivité, permet également d’empêcher les individus de se prévaloir des résultats de ces tests pour revendiquer des droits quelconques. Les assureurs ont interdiction de demander ou de prendre en compte les résultats des examens des caractéristiques génétiques. Dans le cadre médical « l’objectif du test est de rechercher ou plusieur(s) modifications du matériel génétique de l’individu, puis d’établir un lien de causalité entre les anomalies constatées et la maladie » expliquent P.Malzac et M.Mathieu.  

Pour une personne ne présentant pas de signe de maladie, la panoplie des tests se décline notamment dans  :

–  Des diagnostics de prédisposition en cas d’antécédents familiaux de maladie monogénique à expression tardive, par exemple le gène BRC1 et BRC2 pour le cancer du sein ou de l’ovaire, « l’intérêt d’un test présymptomatique et les enjeux d’un résultat positif au test varient selon la maladie, sa gravité, la pénétrance du gène impliqué, et la possibilité de traitement préventif ou curatif ».

La recherche de susceptibilités, par exemple pour la maladie d’Alzheimer, c’est à dire des marqueurs qui augmentent peu la probabilité de développer une maladie. Ces pratiques sont « rarement utilisés en médecine clinique » car ne dégagent que des probabilités d’apparition. Certains de ces tests sont cependant proposés en ligne, en dehors du cadre légal français. Du point de vue de la confidentialité : « personne ne sait actuellement ce qu’il advient des résultats obtenus, ni des échantillons collectés qui pourraient être monnayés » alertent les auteurs à propos de ces tests en ligne.

Dans le cadre de la procréation et pour les enfants à naître, il peut d’agir de tests avant la grossesse ou de tests pendant la grossesse (à ne pas confondre avec les tests de dépistage non génétiques – hormis la mucovicidose-  de 5 maladies au 3èmejour après la naissance). La question de l’extension de ces tests à un public plus large est fréquemment soulevée par les médecins concernés :

Le diagnostic avant conception n’est pas proposé en France en l’absence d’antécédents familiaux. Alors que des voix s’élèvent pour demander l’extension de ces tests avant conception, le Conseil d’Etat estime que ” l’utilité de l’information apportée aux couples ne justifie pas les risques eugéniques qu’il induirait, ce d’autant plus que le système de santé français ne serait pas en mesure de répondre à l’augmentation de la demande en tests génétiques en découlant.

Le diagnostic pré-natal, invasif (sur cordon fœtal) ou non invasif (prise de sang),  à propos duquel le Conseil d’Etat estime que ” l’innocuité d’une technique ne doit pas rétroagir sur l’étendue des affections recherchées à l’occasion de ce diagnostic. Aussi, la circonstance qu’une analyse du sang de la mère à un stade précoce de sa grossesse puisse désormais permettre d’identifier les caractéristiques génétiques de l’enfant à naître ne justifie pas que soient recherchées, à cette occasion, d’autres anomalies que celles présentant une particulière gravité.”

– Le diagnostic pré-implantatoire possible en cas de fécondation in-vitro pour les maladies graves et incurables à risques de transmission élevés.

Dans l’influence du gène, l’épigénétique

Les auteurs de « Tests génétiques : illusion ou prédiction ? » rappelent à cette occasion l’histoire mouvementée du gène et des maladies génétiques, des technologies de séquençage d’ADN- première et deuxième génération-, le projet génome humain de 1985 à 2000 « pour un coût total d’environ 2,7 milliards de dollars» et quelques découvertes de taille :

–  Le génome humain comporte environ 23 000 gènes et non entre 50 0000 et 100 000 comme envisagé avant le début des travaux,

–   L’ADN des humains est semblable à 99,5%. Et les séquences codantes de l’ADN ne constituent que 1 à 2% de la totalité du génome « on a longtemps parlé d’ADN poubelle pour ces séquences… pensant qu’elles n’avaient aucune utilité. Cette situation est en train de changer avec le progrès des connaissances »,

– L’importance de l’épigénétique. Dans l’influence du gène, il s’agit de comprendre de quelle manière s’activent les modifications chimiques : « ces modifications, étudiées par une branche de la biologie appelée épigénétique, sont influencés par l’environnement de la cellule » ce qui constitue « un enjeu réel dans la mesure où notre mode de vie pourrait laisser une trace épigénétique dans nos cellules qui pourrait être transmissible aux générations suivantes ».

 

 

 

 

Tests génétiques : illusion ou prédiction ? de Perrine Malzac et  Marion Mathieu . Paris : Le Muscadier 2017. 

Révision de la loi de bioéthique, quelles options pour demain ? Rapport du Conseil d’Etat. 28 juin 2018. http://www.conseil-etat.fr/content/download/138941/1406918/version/1/file/Conseil%20d%27Etat_SRE_étude%20PM%20BIOETHIQUE.pdf

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