De nouvelles questions pourraient figurer au programme de la prochaine révision des lois de bioéthique, prévue pour 2026. Le Comité Consultatif National d’Ethique, CCNE, évoque notamment : “l’utilisation de gamètes de donneurs possiblement décédés, la destruction automatique des gamètes auto-conservées et les embryons congelés après atteinte de la limite d’âge, les doubles dons pour les femmes seules ayant besoin d’un don d’ovocyte en plus du don de spermatozoïdes plutôt qu’à un don d’embryon, les gamètes artificiels, la greffe d’utérus et la gestation pour autrui…“(1) https://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/2025-03/Avis%20149.pdf . Ces questions se replacent dans le cadre plus général d’une réflexion sur les nouvelles pratiques liées aux technologies de reproduction, sur la conservation et le destin des gamètes humaines – en particulier dans un contexte de baisse de la fertilité et de la natalité-, et sur le statut moral à accorder à des embryons aux origines devenues multiples(1).
Ces interrogations sont partagées par de nombreux pays. Vardit Ravitsky, directrice du Hasting Center, soulève ainsi, outre Atlantique, des questions comparables (2), aussi nombreuses que renversantes : quelle peut-être la “date d’expiration” des embryons congelés ? les limites de l’utilisation post-mortem (ou comment être parent quand on n’est plus là ?), comment interpréter la valeur du lien génétique entre les enfants et leurs parents biologiques ?..L’encadrement législatif et règlementaire apporte aujourd’hui, en France, beaucoup plus de réponses qu’aux Etats-Unis, où l’absence totale de régulation dans le domaine du don d’ovocyte laisse par exemple la porte ouverte à certaines pratiques très lucratives. L’argument de conserver une “liberté reproductive” l’emporte sur d’autres considérations. Ainsi le marché non réglementé dans le domaine du don d’ovocytes pourrait atteindre plusieurs milliards de dollars (3) : “la rémunération varie considérablement, pouvant atteindre jusqu’à 250 000 dollars dans des cas exceptionnels, avec un paiement moyen d’environ 7 000 dollars. Les efforts déployés par l’American Society for Reproductive Medicine (ASRM) pour réglementer ce marché au moyen de lignes directrices plafonnant les rémunérations ont échoué : l’ASRM a tenté de limiter la rémunération des donneuses à 10 000 dollars. Cependant, deux donneuses ont poursuivi l’ASRM en justice, affirmant que ces lignes directrices violaient les lois antitrust américaines en constituant une entente sur les prix. En 2015, un accord à l’amiable a contraint l’ASRM à supprimer ces lignes directrices et à s’abstenir de toute recommandation concernant les prix”(3) souligne Chantal Bitter.
“Alors que la science nous offre aujourd’hui tant d’options pour fonder nos familles” souligne Vardit Ravitsky (2), le modèle français apparait alors dans toute son originalité.
1 – Comité Consultatif National d’Ethique. Baisse de la natalité et de la fertilité : des réponses différentes, des enjeux éthiques partagés. Avis n° 149, février 2025, p. 63.
2 – Hasting Center et le Museum of science, Boston. The Ethics of IVF Embryos: Science, Choice, and Family.https://www.youtube.com/watch?v=BlNnm9fmeV
3 – Chantal Bittner. The Petrie-Flom Center. Egg Donation: A Victory for Reproductive Justice or Another Handmaid’s Tale? 1er février 2025. https://petrieflom.law.harvard.edu/2025/02/04/egg-donation-a-victory-for-reproductive-justice-or-another-handmaids-tale/
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