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Le développement d'embryons in vitro au delà de 15 jours ?

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Développer des embryons  in vitro au delà de 15 jours afin de faire avancer la recherche : la pratique est-elle admissible ? Jean-Claude Ameisen, président d’honneur du Comité Consultatif National d’Ethique, CCNE,  remet le sujet sur la table.

Lors d’une audition devant les sénateurs, le jeudi 7 mars 2018, il a présenté les termes du débat : “contrairement à d’autres pays, le législateur français n’a pas prescrit de délai à cette activité. L’Agence de la biomédecine a, quant à elle, décidé d’un délai de quinze jours en s’appuyant sur les conclusions d’un avis du conseil consultatif national d’éthique. Rien n’interdit cependant dans la loi de cultiver un embryon surnuméraire en France après un tel délai. La Grande-Bretagne interdit une telle pratique après quinze jours, au motif qu’apparaissent, à l’issue de cette période, les premières cellules nerveuses. Le développement in vitro d’un embryon destiné à être implanté in utero, au-delà de 15 jours, est désormais techniquement possible, ce qui conduit à réinterroger notre position (1) “.

Combien de temps peut-on laisser grandir des embryons in vitro, après leur fécondation ? Certains se demandent s’il faut franchir cette barrière que représente le 14 ou 15 ème jour du développement de l’embryon, qui limite depuis des décennies la recherche sur les embryons humains à la fois sur le plan technique et sur le plan juridique dans de nombreux pays. 

En France, le régime établi par la loi de 2013 ne fixe pas de limite légale au développement in vitro d’un embryon utilisé pour la recherche. La seule limite est donc celle des possibilités liées aux connaissances scientifiques et technologiques. Dans d’autres pays le développement in vitro des embryons humains est limité à 14 ou 15 jours. En Grande Bretagne, le professeur Simon Fishel soutient que repousser la limite à 28 jours serait bénéfique à la recherche. En mai 2016 des chercheurs britanniques de l’Université de Cambridge ont annoncé que des embryons avaient survécu 12 – 13 jours in vitro, se rapprochant de la frontière des 14 jours. La frontière scientifique étant franchie, ou en passe de l’être, la question juridique revient sur le devant de la scène. Des voix s’élèvent et souhaitent qu’elle soit l’objet d’un nouveau débat. Dans une enquête récemment menée par la BBC au Royaume Uni, 48% des personnes interrogées étaient favorables à l’allongement du délai de développement des embryons en laboratoire pour la recherche à 28 jours. 

Le problème de la limite des 15 jours illustre parfaitement, pour l’ancien président du CNCE, la difficulté de baser des décisions politiques sur des faisabilités techniques,  ce qui en définitive conduit à se repencher sur la question dès que la technique évolue. Au delà des performances techniques, l’explication suivante, donnée par Henri Atlan, offre un argument suplémentaire pour le débat : «jusqu’à la deuxième semaine, … les cellules produites par division successives à partir de l’œuf fécondé ne sont pas encore différenciées entre celles qui produiront le placenta et les enveloppes amiotiques d’une part (.. ) et celles qui se différencieront et formeront les tissus et organes de l’embryon proprement dit » explique le généticien. 

 

1-  http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20180305/soc.html#toc7

2- Henri Atlan. L’utérus artificiel. Paris : Seuil, 2005. P.74-75. p. 56.

 

 

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