Lien copié

Elève augmenté : enfant instrumentalisé ?

Share On Facebook
Share On Twitter
Share On Linkedin

Le 21èmesiècle sera-t-il le moment historique où le cerveau des enfants sera augmenté par la technologie ? Parallèlement aux smarts drugs (Ritaline, Aderall…), médicaments utilisés depuis plusieurs décennies pour améliorer l’attention des enfants, certains prédisent que de nouveaux moyens viendront amplifier plus radicalement les performances cérébrales, en particulier pour les enfants : des puces cérébrales connectées, des manipulations génétiques… Les recherches, balbutiantes, sont néanmoins déjà engagées à travers le monde autour de technologies BCI (Brain Computer Interface). La course industrielle et militaire pour l’ingénierie neuronale est  lancée. Elon Musk promet des puces cérébrales connectées pour les prochaines années. Des chercheurs se penchent sur le sujet extrêmement complexe des variants génétiques de l’intelligence.

Des controverses infinies se développent sur la possibilité d’une augmentation des capacités cérébrales des humains, qui portent à la fois sur l’efficacité, la sécurité, les effets inattendus, et l’accessibilité. En amont de ces débats, ne faut-il pas s’arrêter un instant sur la question du statut particulier des enfants à ce sujet ?  Car augmenter les capacités cérébrales des enfants à l’aide de ces technologies reviendrait à en faire de simples instruments des projets des adultes. Et les enfants ne sont en aucun cas des instruments au service des objectifs des adultes. Ils ne viennent pas au monde pour réaliser le projet d’autres personnes. La  liberté d’apprentissage des jeunes constitue une condition essentielle de leur liberté future. Face à ces nouveaux pouvoirs exercés par les adultes sur les enfants, leur liberté dans la construction de leur avenir, leur liberté tout court, doit être préservée.

Il reviendra donc à l’Etat de réguler ces pouvoirs issus des nouvelles connaissances sur le fonctionnement du cerveau. Utilisés de manière excessive, comme un instrument au service des intérêts de l’Etat pour le contrôle de l’intelligence artificielle ou pour un autre objectif de compétition internationale, ils pourraient singulièrement entamer la liberté de développement des enfants. Dans cette démarche, deux éléments principaux doivent être pris en compte et justifieraient de faire du cerveau des enfants un territoire protégé :

L’idée de façonner l’esprit des enfants, et l’utilisation d’un « capital humain » n’est  certes pas nouvelle. Les adultes ont toujours cherché à modeler le cerveau des enfants par les apprentissages à contrôler le développement psychique des enfants pour perpétuer le modèle social. Aujourd’hui cependant, le caractère intrusif et potentiellement coercitif des nouvelles technologies biomédicales posent de nouvelles questions. 

Elon Musk prétend que l’humanité n’a pas le choix. Il défend même l’idée que les manipulations génétiques ne permettront pas de développer suffisamment l’intelligence des humains pour que ces derniers restent en mesure de garder le contrôle d’une l’intelligence artificielle devenue de plus en plus autonome et imprévisible. Seul recours pour sauver l’humanité, les puces cérébrales connectées à des plates formes augmenteront le cerveau humain, prédit l’industriel (1). Ce scénario est aussi celui de la « guerre » des intelligences entre humains et intelligence artificielle, l’ouvrage à succès de Laurent Alexandre (2). Certains auteurs proches du courant de pensée transhumaniste, Julian Savulescu et James Hugues, considèrent pour leur part que l’amélioration cognitive des enfants ressort, quel que soit le moyen utilisé, d’une obligation morale, dans  le propre intérêt des enfants.

En dépit de nombreuses dystopies imaginées sur ce sujet, le scénario de l’histoire humaine à venir n’est – heureusement –   pas encore écrit.

 

 

(1)  Neuralink and the Brain’s Magical Future.  April 20, 2017 By Tim Urban https://waitbutwhy.com/2017/04/neuralink.html#part4

(2) Laurent Alexandre. La guerre des intelligences, intelligence artificielle versus intelligence humaine. Paris, JCLattes, 2017. 

 

 

 

 

0 commentaire

Commenter

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Champs obligatoires*